LE CIMETIERE DES ENFANTS PERDUS
UN ROMAN SOMBRE ET BOULEVERSANT
Dans Le cimetière des enfants perdus, Vincent Villa nous plonge dans un thriller aussi sombre qu’insoutenable, là où la noirceur de l’âme humaine semble n’avoir plus de limite, là où la justice se noie dans les silences et les traumas. Dès les premières pages, l’auteur installe une tension glaçante qui ne faiblira jamais, construisant un récit à la fois haletant et dérangeant, où chaque détail compte, et chaque émotion serre le cœur.
Chronique du roman : Le cimetière des enfants perdus • Vincent Villa
Avis du roman : Le cimetière des enfants perdus • Vincent Villa
Ce roman est marquant surtout en tant que maman. Le Cimetière des enfants perdus est dur, parfois dérangeant, mais il a le mérite d’oser aborder frontalement des sujets souvent passés sous silence. J’ai trouvé certains passages un peu longs, notamment au cœur de l’enquête qui semble piétiner par moments, mais l’ensemble reste saisissant et nécessaire.
Vincent Villa lève le voile sur une réalité glaçante : celle des violences sexuelles faites aux enfants, des réseaux pédocriminels, du live streaming, et de ces prédateurs qui évoluent dans l’ombre. Les chiffres cités en fin de roman sont insoutenables : un enfant sur cinq victime d’abus, des centaines de milliers de signalements, et une quantité effrayante de contenus diffusés à l’échelle mondiale. C’est cette horreur bien réelle que l’auteur traduit en fiction, sans jamais tomber dans le sensationnalisme.
L’enquête est complexe, nourrie de fausses pistes, de détours volontairement posés par un criminel qui prend un malin plaisir à manipuler les enquêteurs. Entre jeux de domination, énigmes malsaines et mises en scène déroutantes, nous sommes tenu en haleine, balloté entre plusieurs personnages et deux enquêtes qui semblent d’abord distinctes mais finissent par se rejoindre dans un nœud aussi dense qu’effrayant.
Certains éléments sont particulièrement marquants : des enfants sacrifiés, des gamins volés, des femmes déguisées en petites filles pour tromper leurs proies… On est en plein dans une spirale de perversion où la frontière entre réalité et cauchemar se brouille.
J’ai trouvé la construction des chapitres bien rythmée, alternant les points de vue pour maintenir la tension et illustrer l’urgence de la situation. On sent la pression, l’épuisement, la frustration des enquêteurs – notamment Costa, dont la propre histoire personnelle donne une épaisseur particulière à l’intrigue. La mort de sa sœur, des années plus tôt, insuffle à son personnage une rage froide et une détermination sans faille, que j’aurais d’ailleurs aimé voir davantage mise en avant.
Ce roman marque par son fond puissant et nécessaire, mais j’ai regretté que l’histoire liée aux enfants ne soit pas exploitée jusqu’au bout, avec un fond un peu plus trash et sombre. Certains passages m’ont d’ailleurs rappelé La Constance du prédateur de Maxime Chattam.
J'ai déjà découvert la plume de Vincent Villa dans le roman "Je mangerai ton coeur". Ici on retrouve la plume de l'auteur toujours aussi agréable et fluide dans un thriller agréable à lire. Parce qu’il met en lumière un enfer bien réel que l’on préfère souvent ignorer. Et parce qu’il nous rappelle que tant que la parole des enfants est étouffée, la justice restera en sursis.
Extraits du roman : Le cimetière des enfants perdus • Vincent Villa
Elle ne vit pas arriver la main qui s’écrasa sur sa bouche ni celle qui la souleva à la manière d’une poupée de chiffon. Elle ne put crier ni alerter les gens autour, car les bras qui l’emportaient étaient les attributs d’un monstre de fer. Ils l’entraînèrent juste à l’écart de la plage et la jetèrent sur le sol, où une grosse pierre s’entrechoqua avec sa tête soudain remplie des pires terreurs. Au-dessus d’elle, tantôt bleutées, tantôt rougeoyantes, des arabesques se désintégraient en une poussière précieuse dispersée par le vent chaud. Les prunelles sans arrêt tournées vers l’espace, elle ne vit rien, mais sentit tout, les doigts, la langue, le sexe. Des larmes brûlantes coulaient sans interruption sur ses joues glacées. Les illuminations qui la surplombaient rendaient d’autant plus effroyable l’obscurité qui la submergeait. Sous une nuit en cendres aux relents de fumée et de gaz, son bonheur se consuma en quelques minutes.
À quarante ans, à la sortie d’un sommeil artificiel post-opératoire, elle venait de recevoir des images détenues en captivité par son cerveau et délivrées dans un geyser dévastateur. Vomi par sa mémoire, un viol avait resurgi brutalement. Elle ne s’était jamais sentie aussi sale de sa vie, souillée par le passé le plus immonde. Elle libéra avec rage les cris retenus trente-deux ans auparavant sous l’incandescent déluge du feu d’artifice.
Il a sacrément morflé… Le masque de souffrance collé au visage du défunt semblait d’ailleurs impossible à arracher. Sa bouche était restée ouverte, comme pour lâcher un ultime cri de désespoir, tandis qu’un rictus hideux demeurait figé parmi ses traits, témoignage indubitable des tortures endurées.
À cause de leur lutte déséquilibrée, son téléphone tomba et gicla sur le trottoir, où il resta abandonné, comme elle l’était désormais face à ce monstre qui venait d’arracher son masque de bienveillance. Tout alla bien trop vite, ensuite, pour sa force mesurée de fillette et ses réflexes cadenassés par la terreur la plus paralysante. Un tissu épais plaqué sur les lèvres, des nœuds râpeux serrés autour des mains et des chevilles, un couvercle refermé sur son corps plongé dans l’obscurité d’un caisson poisseux de transpiration : l’enchaînement décrivit l’amorce d’une vertigineuse descente aux enfers.
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