Roman : Derrière la porte • Sébastien Theveny

Chronique Roman : Derrière la porte • Sébastien Theveny

DERRIÈRE LA PORTE :
LE DERNIER SECRET D’HUBERT LACASSAGNE


Voici le petit nouveau de Sébastien Theveny. Dans les profondeurs d’un manoir du Périgord, une famille respectable cache de lourds secrets. Derrière la porte nous plonge dans un huis clos familial où l’hypocrisie se mêle aux rancunes, et où chaque sourire dissimule une blessure ancienne. Entre héritage, trahisons et non-dits, le nouveau roman de Sébastien Theveny explore ce que la mort révèle de plus sombre chez les vivants.



Chronique : Derrière la porte • Sébastien Theveny



Hubert Lacassagne, patriarche d’une riche famille du Périgord, vient de s’éteindre, emporté par la maladie de Charcot. À ses côtés, jusqu’à la fin, Shirley Doumbia, son auxiliaire de vie d’origine malienne, dévouée et bienveillante. Depuis des années, elle a veillé sur lui, vivant au manoir de la Noyeraie, au grand dam de ses enfants : Patrice, Laurence et Sidonie, qui n’ont jamais accepté cette étrangère au cœur du cercle familial.

Lors de l’enterrement, Shirley est tenue à l’écart, observée avec méfiance. Sa peau, son passé mystérieux et sa proximité avec le défunt dérangent. Très vite, les rancunes remontent. Patrice, désormais chef du clan, prend la main sur le domaine. Laurence, soupçonneuse, ne croit pas à une mort naturelle : elle est persuadée que Shirley a manipulé son père, voire précipité sa fin. Sidonie, artiste torturée, laisse entrevoir des blessures intérieures aussi profondes que celles de la maison.

À la Noyeraie, l’atmosphère devient étouffante. Pàl, le fidèle homme à tout faire, observe sans être vu, témoin silencieux des tensions qui montent. Un codicille inattendu au testament vient tout bouleverser. Le vieil Hubert avait encore quelques tours dans son sac, et ses dernières volontés vont semer la discorde.
Entre les lignes d’un carnet retrouvé dans son coffre, ses enfants découvrent un autre visage de leur père : celui d’un homme lucide, blessé, stratège… et bien décidé à régler ses comptes post mortem.

Le 15 août, date maudite, scellera le drame. Ce jour-là, les masques tombent, les vérités éclatent, et la Noyeraie devient le théâtre d’une explosion de secrets enfouis.


Chronique Roman : Derrière la porte • Sébastien Theveny


Avis : Derrière la porte • Sébastien Theveny


Sous les apparences d’un simple drame familial, Derrière la porte explore avec minutie les failles humaines : le poids du passé, les rancunes qui rongent, le racisme ordinaire, la soif d’argent, et cette hypocrisie sociale qui empoisonne les liens du sang. Le roman dissèque sans complaisance une famille respectable en façade, mais gangrenée par les mensonges, la jalousie et l’indifférence affective.

Sébastien Theveny peint ici une histoire où chaque personnage semble porter un masque. Hubert Lacassagne, patriarche usé par la maladie, incarne une génération prisonnière de son éducation : rigide, pudique, incapable d’exprimer l’amour autrement que par le contrôle. Ses enfants, à leur tour, reproduisent ces carences émotionnelles. Patrice, froid et calculateur ; Laurence, orgueilleuse et blessée ; Sidonie, artiste tourmentée et en quête de reconnaissance - tous révèlent à quel point l’argent et le pouvoir remplacent ici les sentiments.

Face à eux, Shirley Doumbia, figure lumineuse mais ambivalente, incarne à la fois la douceur et le doute. Doit-on la croire sincère ou manipulatrice ? L’auteur joue habilement sur cette frontière, entre empathie et suspicion. Son statut d’étrangère, son passé flou, et sa proximité avec Hubert nourrissent un malaise constant.

L'auteur décrit avec justesse ces enfants incapables d’aimer, parce qu’ils n’ont jamais su être aimés autrement que par l’argent. L’écriture est fluide et précise, capte toute la tension psychologique sans jamais tomber dans le mélodrame. Les chapitres s’enchaînent avec rythme pour mettre à jour une famille riche en secrets, trahisons et manipulations. J’ai adoré le passage où l’on plonge dans les pensées d’Hubert, lorsqu’il dresse le portrait au vitriol de ses enfants. C’est piquant, mordant et d’une justesse presque cruelle. Et quand la porte se referme sur la Noyeraie, on reste hantée par cette question : qui, dans cette maison, dit encore la vérité ?

A lire d'urgence 

Retrouvez les autres romans sur la famille Lacassagne : Un frère de trop, Meurtre au Champagne



Extraits : Derrière la porte • Sébastien Theveny



Eh bien ça veut dire que je suis quelqu’un qui assiste, qui aide quelqu’un d’autre. J’ai dédié ma vie à ce quelqu’un d’autre, votre grand-père, sans me préoccuper de moi, sans jamais me préoccuper de mon bonheur ni même de mon bien-être. Et maintenant que la personne que j’aidais, qui était ma raison de vivre, mon quotidien, n’est plus là, je ne sers plus à rien. Je suis devenue inutile. Bonne à jeter.

Les Lacassagne n’étaient pas à proprement parler une famille nombreuse mais les rares membres qui la composaient n’étaient pas des moindres spécimens de rouerie, de duplicité ou de tromperie… et même les plus innocents en apparence étaient-ils les plus à craindre. Puis si ce n’était pas de la famille dont il convenait de se méfier, il gravitait autour du domaine une flopée d’individus. À demeure, comme cette Shirley qui s’était incrustée dans le décor depuis la mort de Viviane, ou par intermittence, tels les livreurs, les artisans, la coiffeuse attitrée, ou encore les divers médecins, infirmières, kinésithérapeutes, orthophonistes, physiothérapeuthes ou ergothérapeutes censés prodiguer les meilleurs soins au regretté Hubert.

Une offre tombée du ciel impossible à refuser. Un contrat à durée indéterminée dans un cadre de travail enchanteur, un manoir de luxe au coeur d’une propriété plus vaste que la cité où elle vivait alors. Une tâche honorable, s’occuper jour H24 d’un vieil homme atteint d’une handicapante et incurable sclérose latérale amyotrophique. Le poste consistait à prendre en charge les soins courants du malade, la préparation et le suivi de ses traitements médicaux, son alimentation particulière, la cuisine, l’entretien de la maison, les courses, les tâches administratives, les démarches auprès des divers prestataires et professionnels de santé, et tant de choses encore qu’elle n’imaginait pas à l’heure d’accepter la mission…

Dans le désert, sous un soleil de plomb, j’ai laissé des plumes, j’ai brûlé ma peau, j’ai abandonné des rêves, j’ai affronté des cauchemars. Dans cet enfer de sable et de pierres, j’ai approché le paradis. Dans l’opulence et la démesure du raid, j’ai touché du doigt la misère. Dans la lumière aveuglante du jour comme dans l’obscurité complète des nuits, j’ai combattu mes peurs.


1 commentaire:

Merci pour votre commentaire. Bonne journée

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