Roman : Histoires jumelles • Jean-Yves Dupain

HISTOIRES JUMELLES : ENQUÊTE MACABRE ENTRE FOREZ ET LAOS

Plongée au cœur des mystères et des âmes tourmentées, Histoires jumelles de Jean-Yves Dupain explore les liens indéfectibles entre deux frères, René et Benjamin, que la distance géographique ne peut séparer. Entre les collines du Forez et les paisibles paysages du Laos, une intrigue captivante se dessine, mêlant drame, spiritualité et une enquête haletante sur une mise en scène macabre. Un roman qui saura captiver autant par son humanité que par son atmosphère.

CHRONIQUE : HISTOIRES JUMELLES • JEAN-YVES DUPAIN

René, jeune curé fraîchement nommé dans une paroisse rurale du Forez, peine à s’intégrer dans une communauté marquée par des traditions solidement ancrées. Lorsqu'une paroissienne fidèle, Marie-Thérèse Fort, est retrouvée crucifiée dans une petite chapelle, son univers bascule. La mise en scène, d’une rare violence, trouble profondément la communauté, et René devient vite une figure centrale de l’enquête, malgré lui.

Dans cette atmosphère lourde de soupçons, la police locale, menée par le commandant Pierre Cronflen et le capitaine Maurice Garmel, tente de démêler les fils de cette affaire. Entre interrogatoires, analyses ADN et exploration des motivations religieuses derrière le crime, chaque indice semble converger vers des révélations bouleversantes.

Pendant ce temps, au Laos, Benjamin, frère jumeau de René, mène une vie paisible loin du tumulte occidental. Accompagné par son ami moine Ananphone, il trouve refuge dans les traditions locales et une spiritualité apaisante. Pourtant, le meurtre de Marie-Thérèse réveille chez les deux frères les stigmates d’un passé tragique qu’ils ont toujours cherché à oublier.

L’histoire alterne entre l’enquête policière et le quotidien de Benjamin, révélant progressivement les douleurs intimes et les secrets des jumeaux. Alors que René est confronté à des accusations implicites et aux doutes de ses paroissiens, Benjamin pressent que ce drame pourrait bouleverser à jamais l’équilibre fragile qu’ils ont construit. La distance géographique ne parvient pas à briser leur lien fusionnel, et leurs échanges reflètent leur profonde solidarité face à l’adversité.

AVIS : HISTOIRES JUMELLES • JEAN-YVES DUPAIN

Histoires jumelles est une lecture agréable qui séduit par sa plume fluide et ses personnages attachants. Jean-Yves Dupain parvient à tisser des relations humaines réalistes et touchantes, tout en instillant un doute constant sur la culpabilité de chacun. À mesure que l’intrigue avance, le lecteur est pris dans ce climat de suspicion, où aucun personnage n’est à l’abri des soupçons.

Un des atouts du roman réside dans sa capacité à faire voyager le lecteur, notamment au Laos. L’auteur semble particulièrement bien documenté sur les traditions, les paysages et la vie quotidienne de cette région, si bien qu’on a l’impression de partir avec les personnages, de ressentir l’atmosphère des lieux et de s’immerger dans une culture différente. 

Ce roman n’est pas un thriller. L’enquête avance lentement, sans violence ni suspense haletant, ce qui lui donne un rythme posé. Si cette simplicité peut plaire à certains, j’aurais apprécié un peu plus de dynamisme pour insuffler davantage de vie et de tension à l’histoire.

Un autre point notable est la place de Georges Brassens dans le roman. Si l’auteur semble vouloir rendre hommage à l’artiste en citant ses chansons à 29 reprises, ainsi que de nombreux titres sans le mentionner explicitement, cette récurrence finit par alourdir la lecture. Ces références, bien qu’amusantes au départ, n’apportent ni intérêt ni incidence à l’intrigue, ce qui peut devenir redondant.

Un autre point notable du roman est la présence récurrente de personnages jumeaux. Si les deux protagonistes principaux, René et Benjamin, forment un duo attachant et bien exploité, l’histoire inclut pas moins de cinq paires de jumeaux, un fait relativement rare puisque cela ne représente qu’environ 1,25 % des naissances. Bien que cet élément apporte une certaine originalité, il devient rapidement redondant, à l’image des nombreuses références aux chansons de Brassens, et aurait gagné à être utilisé avec plus de parcimonie pour conserver son impact narratif.

Malgré ces petits bémols, le roman se lit avec plaisir grâce à une écriture soignée et des personnages qu’on prend le temps de découvrir. Ce n’est pas un coup de cœur, mais une lecture plaisante pour ceux qui aiment les enquêtes simples et humaines.

EXTRAITS : HISTOIRES JUMELLES • JEAN-YVES DUPAIN

Moi, je vais courir le monde pour oublier, mais nous resterons en contact. Chaque dimanche à 13 heures, sois devant un ordinateur, tu en trouveras bien un dans ton séminaire, et c’est moi qui te contacterai par mail. Je t’aime mon frère.

En entendant dans ses oreillettes Brassens chanter La Cane de Jeanne, il eut une pensée pour son frère René qui devait, à cette heure-là, célébrer la messe de Pâques. Il faudrait impérativement, une fois sa rencontre avec Ananphone terminée, qu’il passe au cybercafé pour lui envoyer un e-mail et prendre de ses nouvelles.

Au fil de la discussion, René comprenait le sens des questions que le commandant lui posait : il était suspect ! D’ailleurs, il constata qu’Isabelle Weeger, Louis Garmel la lui avait présentée en arrivant, l’observait avec un regard en coin, pas très sympathique, alors qu’elle arborait, précédemment, un visage plutôt charmant.