Roman : Anna O • Matthew Blake

L'AFFAIRE ANNA O
QUAND LE SOMMEIL DEVIENT UNE ÉNIGME JUDICIAIRE

Le passé est le seul moyen de guérir le présent.

Le premier roman de Matthew Blake : Anna O. Passionné de neurosciences, de Freud et de romans policiers à la Agatha Christie, l’auteur s’est inspiré de tout cet univers pour construire une intrigue à la frontière du médical, du judiciaire et du psychologique. Dès les premières lignes du résumé, une question percutante s’impose : "Est-on responsable de ses actes lorsque l’on dort ?"

C’est autour de cette interrogation que s’articule un thriller étonnant, où le sommeil devient un élément central d’une enquête aux enjeux judiciaires et humains. L’auteur nous emmène dans les méandres d’un cas hors norme, explorant la complexité de ses personnages et des thèmes profonds comme la conscience, la culpabilité et les limites de la science.

Anna O • Matthew Blake - L'histoire

Dans les annales judiciaires, rares sont les affaires aussi déroutantes que celle d’Anna O. Plongée dans un sommeil profond depuis quatre ans après avoir poignardé deux personnes, elle reste introuvable derrière ses paupières closes. Impossible à réveiller, son état déroute médecins, juges et opinion publique.

Derrière ce drame figé dans le temps, deux hommes incarnent les positions opposées de cette affaire. D’un côté, le Dr Benedict Prince, expert du sommeil et psychologue judiciaire, mandaté pour tenter de comprendre ce qui s’est réellement passé dans l’esprit d’Anna.
Est-elle coupable ? Était-elle consciente ? Peut-on juger une personne endormie ?

De l’autre, Stephen Donelly, représentant du ministère de la Justice, qui exige un procès et une justice équitable pour les victimes. Pour lui, Anna doit répondre de ses actes, quel que soit son état.

En parallèle, une influenceuse nommée Lola prétend détenir des informations clés sur le passé d’Anna. Elle utilise les réseaux sociaux et le journal intime de la jeune femme pour distiller des indices, critiquant ouvertement les failles de l’enquête officielle.

Entre psychologie, neurosciences, manipulation et pression médiatique, l’affaire Anna O nous entraîne dans un véritable labyrinthe, où la vérité semble toujours à moitié dissimulée.

Pourquoi Anna dort-elle encore ? Est-ce une fuite inconsciente ? Une protection psychique ? Ou un symptôme d’un mal bien plus profond ? Une seule certitude : cette affaire marquera durablement les esprits.

Anna O • Matthew Blake - Mon avis

Je vous offre une porte de sortie, Ben. Vous n'avez qu'un mot à dire et cela deviendra mon problème et le mien seulement [...]. Aucun praticien digne de son doctorat ne refuserait l'opportunité de travailler sur le cas Anna O. Je ne fais pas exception à la règle.

Combien de meurtres ont été commis au cours des quatre années qui se sont écoulées depuis cette nuit-là. Des centaines, des milliers même, dans le monde entier. Mais aucun ne fait la une des journaux comme elle l'a fait. Non, Anna O a toujours eu quelque chose d'unique. C'est morbide, vraiment.

Mon traitement pour Anna repose essentiellement sur la stimulation sensorielle, dont elle a été privée depuis qu'elle a été arrêtée à la Ferme cette nuit-là. Ses sens sont stériles, vides, rabougris. Je dois les réveiller.

Plus je traite Anna, plus je me sens protecteur à son égard. Le monde a sali sa réputation et sa famille est encore sous le choc des retombées. Harriet et moi sommes les deux seules personnes qui lui restent. Je suis le gardien qui s'élève entre Anna et le monde; je suis le prince de conte de fées, qui a juré de la protéger et de la libérer, même si cette notion paraît odieuse à nos sensibilités modernes.

Ce roman m’a permis de découvrir un sujet que je n’avais jamais abordé en lecture : les mystères du sommeil et certains troubles psychiatriques rares, comme le syndrome de résignation, dans lequel des patients s’enfoncent dans un état comateux lorsqu’ils sont confrontés à une perte totale d’espoir. Une thématique peu courante et fascinante, abordée avec sérieux.

Matthew Blake s’appuie sur des bases solides et pose des questions intéressantes sur la responsabilité pénale en état de sommeil, la conscience de soi, ou encore le poids du trauma psychologique. En cela, le roman a une vraie richesse de fond.

Mais malheureusement, l’histoire manque de tension dramatique. On est loin d’un thriller haletant. L’ambiance est celle d’un roman hospitalier, davantage centré sur les symptômes, les traitements et les analyses que sur une enquête palpitante.

Le rythme est lent, très lent. Trop lent. J’ai eu du mal à rester accrochée. Le roman dépasse les 500 pages, et la narration traîne parfois en longueur sans proposer de véritables rebondissements.

Les personnages, bien que plutôt bien construits, peinent à susciter un véritable attachement. L’auteur parsème son récit de nombreuses pièces de puzzle qu’il assemble dans les dernières pages… mais le twist final, qui a séduit bon nombre de lecteurs si l’on en croit les commentaires, ne m’a pas convaincue. L’intrigue reste, à mes yeux, trop sage, manquant de tension, de piquant et de prise de risque, pour faire un vrai thriller digne de ce nom.